Paris : leader mondial de l’urbanisme progressif selon Jimmy Parat

Jimmy Parat parle de l'urbanisme progressif de Paris

A l’heure où les villes sont sous la pression de la croissance démographique, du réchauffement climatique et de l’aggravation des inégalités, nous devons tirer le meilleur parti de nos espaces urbains. Le spécialiste en urbanisme Jimmy Parat explique.

Pour un urbanisme démocratique

« Face à ces défis, Paris ouvre la voie vers une forme d’urbanisme plus transparente et démocratique, pour que la ville continue à se développer de manière équitable et durable. » explique Jimmy Parat.

Sous la direction du maire Anne Hidalgo, la ville avait ouvert au vote populaire 5% de son budget annuel, soit 20 millions d’euros. Les Parisiens ont été invités à sélectionner des projets architecturaux et urbains financés par la Mairie. Les projets gagnants comprenaient des installations artistiques publiques, des espaces de travail en commun, de nouveaux espaces piétonniers, des jardins communautaires et des fermes verticales.

Urbanisme Paris : Face à la réduction des budgets

Mais les autorités locales du monde entier sont confrontées à des budgets serrés et à une diminution du financement des gouvernements centraux, ce qui limite leur capacité à améliorer nos villes. Pour l’instant, la portée des projets de régénération urbaine financés par l’État est donc limitée.

Une autre solution consiste à prêter ou à vendre des terrains et des bâtiments publics à des investisseurs privés, qui disposent des capitaux nécessaires pour financer les grands aménagements urbains et moderniser les infrastructures. Pourtant, la régénération menée par le secteur privé s’accompagne de ses propres problèmes : les promoteurs privés cherchent à rentabiliser ces nouveaux projets, ce qui signifie qu’ils échouent souvent à répondre aux besoins locaux et à accélérer la gentrification.

Réinventer Paris

Pourtant, il semble que Paris ait trouvé un moyen de naviguer dans ce processus d’une manière plus transparente et plus engageante. En 2014, le maire Hidalgo a lancé Réinventer Paris, un concours international de  » projets urbains innovants  » pour réaménager 23 sites dans la capitale française. Les zones sélectionnées comprenaient d’anciens bains publics, des sous-stations électriques abandonnées, des parkings, des hôtels désaffectés, des terrains vides et des friches industrielles.

Plus tôt cette année, les 23 projets gagnants ont été annoncés. Celles-ci font actuellement l’objet d’un dernier cycle d’examen et – sous réserve de l’approbation finale – la construction devrait commencer en 2017.

L’assouplissement des règles d’urbanisme Paris

Pour le concours, la Mairie a assoupli ses règles d’urbanisme Paris afin d’encourager la participation d’organisations plus petites, moins familières avec les complexités du système d’urbanisme rigide de Paris. Dans les deux premières étapes, la seule contrainte pour les propositions était qu’un architecte devait être impliqué.

Plus de 800 équipes du monde entier ont manifesté leur intérêt sur le site de la compétition. De là, 358 ont soumis un projet de proposition et 75 ont été présélectionnés par 23 jurys indépendants (un pour chaque site). Les propositions complètes ont ensuite été soumises à un jury international indépendant, composé d’architectes, de designers, de chercheurs et de représentants de chaque conseil municipal et de chaque parti politique à l’hôtel de ville.

Objectif : attraction de capitaux extérieurs

Réinventer Paris a offert une alternative aux stratégies qui favorisent les projets de  » grand design  » et l’attraction des capitaux étrangers. « Au lieu de cela, elle a encouragé les architectes et les promoteurs à collaborer avec des start-ups, des organisations de base, des universités et des artistes », dit Jimmy Parat.

A cette fin, la Mairie de Paris a mis en place une plateforme en ligne, qui a permis aux organisations et aux individus de présenter leurs idées et de faire équipe avec d’autres qui partageaient des ambitions similaires.

Par exemple, l’équipe gagnante pour le réaménagement du site de la gare de Massena comprend un architecte, un collectif d’agriculture durable, une université, une galerie d’art contemporain et un lieu musical. Le projet proposé, « Realimenter Massena », comprendra une ferme urbaine verticale, ainsi qu’un restaurant, une salle de musique et un ensemble de logements sociaux et privés. Un seul projet lauréat est actuellement mené par un « starchitecte » – la rénovation de l’hôtel Morland, par David Chipperfield.

L’urbanisme du 21e siècle

Malgré ces aspects positifs, le processus a fait l’objet de certaines critiques. D’une part, l’Ordre National des Architectes s’inquiétait du fait que les équipes présélectionnées devaient travailler gratuitement sur des propositions longues et très détaillées. Dans le cadre d’appels à projets réguliers, les finalistes reçoivent 80 % des coûts engagés par les municipalités pour l’élaboration de leurs propositions. Mais dans le cas de Réinventer Paris, c’est aux équipes elles-mêmes qu’il incombait d’obtenir les fonds nécessaires pour élaborer leurs propositions auprès des partenaires financiers.

Malgré cela, l’ordonnance a reconnu les avantages d’une telle approche flexible dès la première étape du concours. Elle a sans aucun doute élargi l’éventail des organisations incluses dans le processus de planification.

Cependant, Jimmy Parat rappelle que les  » projets à dominante commerciale  » pourraient potentiellement accélérer la gentrification de la capitale française. Il est vrai que la « viabilité économique » était un critère clé et que la plupart des propositions retenues ont une forte composante commerciale : beaucoup sont des projets mixtes offrant des zones commerciales, de loisirs et d’habitation. Mais la municipalité a également mis en place des exigences en matière de logement social pour 12 des 23 sites sélectionnés pour le réaménagement.

Grâce à ce concours, 1 341 nouveaux logements seront construits d’ici 2020, dont près de la moitié seront des logements sociaux. Bien sûr, il y en aura d’autres.